On dit que les prénoms définissent une personne.
Dans mon cas, c'est particulièrement vrai. Voyez ! Jean suppose la douceur.
Pas de problème ! à 51% du temps et plus, je suis doux. Claude pour sa part
vient du nom qu'on avait donné à l'empereur romain Claudius parce qu'il
claudiquait, c'est-à-dire qu'il boitait. Ce qui est mon cas. Je suis né avec
une malformation congénitale qui affecte tout le côté gauche de mon
corps. Pendant 45 ans, on a mis cette malformation sur le dos de la
poliomyélite, diagnostic qui a été contredit lors des tests que j'ai
passés à l'Institut de Neurologie de Montréal. C'est à partir de là qu'on
a diagnostiqué la Fibromyalgie.
Depuis quand suis-je fibromité ? (Quel beau mot !
je l'ai adopté pour la vie...). je n'en ai aucune idée. J'ai toujours été
chétif (dans le bon sens du terme s'il vous plait, bien que c'est vrai aussi
que j'ai été plutôt trouble-fête, surtout à l'âge adulte). En passant,
ne vous en faites pas si je spécifie le sens des mots qui pourraient être
ambigus, c'est une déformation professionnelle. Je disais donc que j'ai
toujours été malade. Dès ma prime enfance, les séjours dans les hôpitaux
faisaient partie de la routine. Tellement, que je n'ai pas pu suivre mes
parents quand ils ont déménagé à l'extérieur de Sherbrooke. Il fallait
que je sois près de "l'hosto".
Au début de l'adolescence, j'ai pu quitter le
cocon que m'avait si généreusement et chaleureusement tissé ma grand-mère.
Je suis devenu pensionnaire chez les frères du Sacré-Coeur à Bromptonville.
Je quittais les Soeurs Les Filles de la Charité, qui étaient propriétaires
de l'Hôtel-Dieu de Sherbrooke que je fréquentais. Elles étaient toutes
très heureuses que je me dirige vers la fraternité religieuse. Je les
connaissais bien ces soeurs. Mes parents et grands-parents géraient la ferme
qu'elles possédaient (aussi) à Beauvoir. Cette ferme était plus importante
que la ferme expérimentale de Lennoxville avec son bétail de race, sa
laiterie, et ses instruments aratoires à la fine pointe de la technologie.
C'est sur cette ferme que malgré mon handicap, j'ai appris les durs travaux.
Pendant les vacances estivales, je rejoignais ma
famille à La Patrie. Mon père, technicien en agronomie formé chez les
Trappistes de Oka, avait décidé de quitter la ferme des soeurs pour devenir
bûcheron. Il travaillait aux É-U. Mes parents avaient acheté ce que nous
appelions à l'époque un lot de colonisation. En 1965, nous n'avions pas
encore l'électricité, pas d'eau courante et la maison avait la grandeur
d'une pitoune de sarrasin, (genre de crêpe). J'avais donc, avec mon frère,
à bûcher ce lot durant l'été pour défricher de la terre neuve, couper des
billots et de la pitoune (bûches de sapin, d'épinette et même de bois franc
[le bois franc devait être écorcé avant d'être cordé. Un poisson frétillant
au bout d'une canne à pêche est moins glissant que ça et, que dire des
mouches noires qui nous mangent en vie lorsque nous sommes accroupies pour
faire notre travail]). Dans les temps libres, nous faisions le bois de
chauffage. C'est dire que nous ne pouvions pas chômer.
Avec mes capacités réduites, je fournissais à
l'ouvrage, mais seulement par orgueil. Combien de soirées et de nuits j'ai
passées à me lamenter à tous les saints pour qu'on s'aperçoive que je ne
pouvais pas maintenir ce rythme de forcené. Peu importe, j'ai rarement
"chier su'l bacul", c'est-à-dire manqué à l'ouvrage. Je me
rappelle un jour où, particulièrement fatigué, je m'étais emporté contre
notre cheval (pour celles et ceux qui ont vu le film de Séraphin,
rappelez-vous cette scène où Alexis surcharge son cheval qui casse son
attelage). Mon pauvre King, c'était son nom, s'est sauvé à un train d'enfer
parce que je l'avais maltraité. Et mon père m'avait dit :" qu'est-ce
que tu veux faire de ta vie ? travailler dur comme ça, alors que tu n'es pas
capable ou retourner aux études ? (C'est vrai que je m'étais sauvé du CÉGEP,
maudit CÉGEP)
Je ne suis pas retourné aux études sur le coup
parce que j'ai rencontré "mon homme". 5 pieds 1, les yeux bruns et
un minois à ravir tous les saints du paradis. Lise qu'elle s'appelle. Le coup
de foudre ! Que voulez-vous, devant un tel accident, un gars revoit sa ligne
de vie. Pour rester près d'elle, j'ai été opérateur de machineries lourdes
et homme à tout faire, mais vraiment tout faire, surtout ce que les autres ne
voulaient pas faire... Encore là, les forces m'ont trahi. J'ai changé de métier
pour devenir commis dans une épicerie. Même scénario, j'avais les tâches
les plus ingrates et les plus difficiles à faire. (Je crois en cette théorie
qui dit que le physique dicte le genre de relations qui s'établissent entre
les personnes. Les "gringalets" (rachitiques ou difformés) sont
confinés dans les tâches subalternes et souvent doivent travailler au-delà
de leurs capacités tandis que les belles personnes ont plus de chance
d'obtenir des postes plus attrayants...)
Et j'ai eu la chance de m'acheter un commerce : je
vendais le pain de porte en porte dans la belle région du mont Mégantic.
Mais, parce qu'encore là, il y avait un mais ! les charges étaient lourdes,
et les chemins affreux. Puis il faut le dire, le bonhomme était trop
ambitieux... À titre d'anecdote. Les chemins étaient si mauvais que
lorsque est venu le temps de mettre au monde notre première fille, il a fallu
descendre à Sherbrooke deux semaines avant terme. Nous ne savions pas si les
routes seraient facilement praticables en cas de pépin...
Après 5 ans de ce rythme de vie infernale (je défonçais
en moyenne 20 pneus par saison), la colonne vertébrale que j'avais déjà
fragile s'est brisée. J'ai paralysé des jambes. Je suis resté un mois
à l'hôpital pour subir une greffe sur trois vertèbres. Une année de
convalescence. Nous avions eu un deuxième enfant. À trois mois, il était
presque aussi gros que moi... Dès que la convalescence a été terminée,
j'ai obtenu le poste de dg d'une base de plein-air à relancer. J'ai eu
deux équipes de 10 personnes pour m'aider à accomplir la tâche.
Mais c'était des B.S. J'en vois qui ont le
poing roulé jusqu'au coude prêt à défendre les assistés sociaux. Ne vous
en faites pas parce que je venais de "sortir" moi-même du B.S. J'ai
dû recourir à l'assistance publique parce que les assurances et la
CSST n'assuraient pas des personnes qui avaient des handicaps comme le mien et
qui avaient choisi d'accomplir de lourds travaux...
Je connaissais le tabac et surtout, je connaissais
la majorité de ces personnes. Pour la plupart, elles avaient des histoires
longues comme le bras d'antécédents pénibles. Parmi celles-ci, il y avait
plusieurs alcooliques. Leur rendement au travail n'était pas toujours des
meilleurs. Je les ai rendu responsable de leurs réalisations. Certains s'étaient
dit capables de construire un pont, d'autres d'élaguer des sentiers, d'autres
enfin de construire des habitations. J'ai eu peu de discipline à faire lors
de ces chantiers. Les personnes étaient fières de ce qu'elles faisaient et
surtout, ensemble, nous avons "fourré" le gouvernement en faisant
beaucoup plus que ce qui était prévu dans nos contrats. Quelle a été la
fierté des gars de venir me défendre contre le "méchant"
fonctionnaire du gouvernement qui m'a sauté à la couette parce que je ne
m'en était pas tenu à la description des tâches. Même si les travaux étaient
herculéens et les journées très longues, ce furent là de merveilleuses années.
Et en 1979, n'en pouvant plus d'endurer les
douleurs constantes, j'ai décidé de retourner aux études, marié, avec deux
enfants et un troisième qui s'était annoncé. Lise ne travaillait pas. Elle
veillait aux enfants. La première année universitaire en a été une à
inscrire dans les annales des plus fous de la terre. Du mois de septembre, au
mois de décembre, nous n'avons pas eu une seule entrée d'argent. Je
parcourais encore plus de 140 km par jour pour aller à l'université. Mais
j'avais la possibilité d'avoir un bon crédit au magasin coopératif du coin.
Et il m'a fallu me remettre à apprendre au milieu de gars et de filles qui
avaient 10 ans de moins. Ça n'a pas été tous les jours facile.
Après la première cession, j'ai décidé de
poursuivre jusqu'à la maîtrise. Pour y arriver, je devais compléter les
revenus des prêts et bourses en travaillant. Parce que je ne peux pas faire
rien simplement, je me suis trouvé un des pires emplois existants mais en même
temps, un des plus agréables : animateur sur un site de camping. Horaire : 7
jours semaine de 9 h à 22 ou 23 h. Lise et les enfants venaient me voir sur
le site tant j'étais absent. Plus tard, j'ai assumé la même tâche mais en
ajoutant 3 heures et 60 km supplémentaires de nuit pour remplir un contrat à
l'université. Et je fus en fin de bacc, animateur à l'Observatoire
astronomique du mont Mégantic où les horaires de jour et de nuit s'entremêlaient.
Certains matins, je devais coucher à la résidence des chercheurs parce que
j'avais pas le temps de redescendre à la maison avant de reprendre l'autre
quart de travail. C'était tout simplement passionnant.
La blague quand mes amis universitaires me
voyaient revenir de vacances, c'était de mesurer la blancheur de mon visage
à l'étalon des murs des couloirs. Plus souvent qu'autrement, j'étais plus pâle
qu'eux... J'ai accompli mon défi de terminer la maîtrise. Sauf que lors de
la soutenance, j'ai eu une prise de bec avec mon directeur de mémoire. Ce qui
n'était qu'une formalité est devenue une bataille rangée. L'un et l'autre
étions tellement butés et sûrs de nos énoncés que ce qui devait durer
quelque 15 minutes s'est transformé en un débat épique de plus de 3 heures.
Ce fut tellement dur qu'une étudiante qui devait soutenir un peu plus tard a
retiré son mémoire...
Et comme je ne pouvais pas faire les choses
simplement, je me suis lancé dans la gestion municipale. J'y consacrais
plus de temps que j'en gardais pour le travail rémunéré. Après mes études,
j'ai été meunier, travail très dur physiquement. Les bennes d'une
demi-tonne, les poches de 40 kilos, et autres étaient notre lot quotidien.
Après un autre accident de travail, ô combien prévisible, j'ai été secrétaire
pour une compagnie de guitare et enfin, j'ai pu aller enseigner. Mais on
m'avait à l'oeil puisque je brassais pas mal les "bonnes gens" au
conseil municipal et dans le monde du développement économique régional.
J'ai enseigné pendant 6 ans avant de me faire remercier de la plus cavalière
des façons.
Ce fut la dégringolade. J'ai perdu mon poste
d'enseignant. J'ai dû laisser la mairie parce que je n'étais plus capable.
J'ai dû gérer la faillite de la base de plein-air dans laquelle je m'étais
tant investi. Tous les efforts que j'avais fait à la mairie pour fusionner la
municipalité de campagne à celle du village afin de proposer un compte de
taxe acceptable et des équipements de loisir meilleurs ont été balayés
du revers de la main par un putsch inqualifiable. Pour couronner le tout, nous
avons perdu notre maison à cause d'un mauvais contrat. J'ai craqué, sérieusement
craqué. J'avais commencé à boire de l'alcool pour m'aider à supporter
le train de vie de fou que je menais. J'ai plongé avec autant de ferveur
qu'avant dans les profondeurs de l'alcoolisme. Lise m'a supporté pendant près
de 10 ans alors que je ballottais dans une galère infernale.
Nous avons pu racheter notre maison. Mais l'âme
n'y était plus. Et en plus, le fait d'avoir changé de maire nous a fait
grimper un compte de taxes municipales d'une façon incroyable. Puis nous
avions dû recourir à l'Assistance sociale encore une fois. J'étais un perpétuel
enragé. Enragé au point d'avoir tenté le diable sérieusement en conduisant
de façon suicidaire. Parce que toute la colère que je vivais je me la
plongeais dans le plus profond des entailles. Et il y a eu aussi 8 suicides et
tentatives de suicide autour de moi. Une nuit, c'est un gars qui m'a appelé
du fond de sa détresse. C'est incroyable ce que la douleur peut produire sur
une personne... Il s'en est sorti. Puis j'ai perdu deux de mes
anciens étudiants qui se sont suicidés dont un que j'ai trouvé au bout de
deux jours. Disons que ces 10 ans de merde nous ont bousillé l'existence à
Lise et moi.
Et un jour... Enfin, il y eut un jour où par un
hasard comme seul le hasard peut en concocter, j'ai rencontré une dame qui
voulait acheter une maison dans le village, mais qui n'avait pas encore bien réfléchi
à la question, qui n'était pas encore tout à fait prête... Je
l'invite donc à venir nous visiter le dimanche suivant. Nous n'avions pas
songé sérieusement à vendre, mais... Le même dimanche, la promesse d'achat
s'est signée. Un mois pour déguerpir... Et pas de maison à l'horizon... Qu'à
cela ne tienne, nous avons fait un tour d'auto. Nous avons vu une petite
maison de 18 pieds sur 24 (moins de 5 mètres sur 7). Lise a repéré 4
magnifiques chênes et malgré que le terrain fut en friche, j'y ai vu
l'emplacement d'un jardin et d'un bout de terre pour y faire de l'élevage. Et
par téléphone, nous avons acheté ce paradis le soir même.
Il a fallu déménager nos pénates. Nous avions
meublé une maison dont la superficie faisait trois fois celle dans laquelle
nous aménagions. Par chance que nos plus vieux emménageaient en même temps.
Nous nous sommes débarrassés de la laveuse et sécheuse, de la cuisinière,
du lave-vaisselle, des mobiliers de salon, etc. Nous n'avons gardé que le
strict minimum et le nouvel enfant qui venait de naître... À l'aube de la
cinquantaine, nous en étions au même niveau qu'un couple de jeunes mariés :
hypothèque, enfant, et du travail à faire pour rebâtir l'harmonie qui nous
animait déjà...
Voilà 6 ans que nous créons notre qualité de
vie au quotidien. Les douleurs ne se sont pas effacées. Au contraire, elles
augmentent. Mais avec cette animation et ce besoin de bouger que j'ai appris
à contrôler, je crée au quotidien une meilleure qualité de vie. J'ai
fini d'agrandir et de rénover la maison. J'ai encore des travaux à l'extérieur
qui sont prévus pour l'été. J'élève des petits animaux qui sont une thérapie,
etc. Des projets, nous en avons encore pour 50 ans. J'ai la rédaction
d'un cours que je veux finaliser. À chaque jour, des éléments nouveaux
s'ajoutent qui me font revoir des paragraphes, des chapitres.
Lise vient de s'inscrire à un cours en phytothérapie.
J'ai entre les mains mon formulaire de demande d'admission pour des cours en
éthique, philo et théo pour septembre prochain. Il y a des jours où je
doute sérieusement de mes capacités et je crains de ne pas avoir assez de mémoire
ou de capacités intellectuelles et physique pour atteindre mes nouveaux
objectifs. Il faut dire que mes capacités intellectuelles en prennent pour
leur rhume ces temps-ci. J'ai de gros déficits de mémoire et de grands épisodes
de fatigue. Quand j'abuse, les douleurs montent facilement à la hauteur des 8
et même 9 dans l'échelle des douleurs alors que quand je prends soin de moi,
elles stagnent à 4 ou 5, à peu près.
En conclusion de cette histoire, il n'y en a pas
de conclusion... comme disait Olivier Guimond, à l'époque. Il n'y a qu'un
avenir à bâtir à tous les jours à la façon même de ces particules
sub-atomiques qui créent l'espace au fur et à mesure de leur voyage sidéral.
Les questions portant sur l'avenir m'importent vraiment peu (mais un gros peu
quand même). Julien, notre tardillon, Lise et moi vivons des moments de
grandes qualités. Les plus vieux nous appellent ou viennent nous visiter régulièrement.
Leurs projets, leurs ambitions, leurs problèmes, ils nous les confient avec
confiance. Ils "raptent" Julien à l'occasion, nous laissant Lise et
moi à nos amours...
Le printemps est joyeux, l'été pétant de
potentiel, l'automne regorgeant de ses fruits, et l'hiver nous permet de nous
serrer un peu plus l'un contre l'autre. Nous continuons à vivre de l'aide
sociale. Nous avons appris sur le tas une façon de mieux vivre. Nous essayons partager
avec les autres une partie de nos expériences. Nous avons encore
tellement à apprendre. Pour moi, apprendre est aussi nécessaire que boire ou
manger. Partager des bribes de ces acquis me vaut tout l'or du monde. Et ce
calme que nous avons trouvé nous est salutaire.
Vous me direz que nous sommes chanceux de vivre
comme ça aujourd'hui. C'est vrai. Mais n'oubliez pas que cette oasis a été
découverte après des années à traverser le désert, après des années de
souffrances inacceptées, de périodes de désespoir profond, et autres
"flagosses" aussi rageantes. Notre relation de couple a perduré. Je
ne comprends pas toujours ni pourquoi, ni comment.
Aujourd'hui, je mets sur le dos de l'âge, le
semblant de maturité qui m'habite. C'est à force de foncer dans les
garde-fous que j'ai appris à conduire de mon côté de la route. C'est à
force de me donner des "coups de marteau sur les doigts" que j'ai
appris à vivre. Si les épreuves de la décennie 90 avaient été vécues
lorsque j'avais 30 ans, je crois que je me serais suicidé. Je n'aurais pas eu
suffisamment de "connaissances" pour passer à travers.
En deux mots, les derniers, j'ai appris que la
vie, nous l'apprivoisons à la façon de la rose du Petit Prince. Plus elle
est sauvage et brutale, plus elle est riche de promesses. Parce que la gaine
qui l'entoure, et contre laquelle nous butons, protège un précieux joyau. Il
nous faut la patience et le courage de la sortir de son écrin. Plus nous en
approchons de ce bijou, plus l'expectative de le voir dans sa plénitude rend
facile la tâche. Mais le boulot n'est pas fini. Il reste encore du matériau
solide à briser. Nous apprenons toutefois qu'il faut y aller avec plus de délicatesse
de crainte de le rayer ou de le faire éclater. Est-ce que demain sera bon
? Et puis après ! J'ai encore tant de secondes à vivre avant d'y arriver.
Je me fait l'impression de faire la morale.
Souffrez aujourd'hui, demain sera meilleur... Si au moins c'était vrai. Ce
que je veux dire, c'est qu'avec l'âge et l'expérience de l'âge, il est des
choses que nous pouvons faire différemment. Mais rien n'est acquis pour
autant. Un décès, une maison qui part en fumée, un enfant qui devient
gravement malade, un divorce, et combien d'autres malheurs nous pendent au
bout du nez... J'ai appris que ces épreuves n'étaient là en ce moment.
Quand elles arriveront, parce que la vie, la maladie et la mort sont incontrôlables,
nous aviserons en temps et lieu. Nous les sortirons les mouchoirs, nous les
lancerons ces cris de rage ou de désespoir. Nous apprendrons à guérir de
ces épreuves. Mais pour l'instant, elles ne sont pas là. Alors pourquoi me
mettre martel en tête ? La neige est blanche. Le ciel est rosé du coucher du
soleil. Des éclairs zèbrent le ciel. Qu'y puis-je? Rien, mais je peux
m'adapter pour profiter de ces conditions ou me buter et rager contre elles.
Ce beau parleur s'appelle Jean-Claude Vézina