TÉMOIGNAGES

Un syndrome d'hypersensibilité ?

par Michèle Guérin  

Je travaillais depuis peu en clinique de physiothérapie et mon expérience en massage thérapeutique était plutôt limitée, lorsque son médecin m'adressa Ginette, atteinte de fibromyalgie.

Nous avions alors opté pour le massage suédois.  Mais les régions du quadrant extéro-supérieur de la fesse et du haut du dos, depuis le trapèze inférieur, étalent si sensibles au toucher, même superficiel, que Ginette en pleurait déjà lors des pressions glissées.  Alors vous dire pour les autres manoeuvres !

J'étais désemparée.  Mes manoeuvres étaient-elles si maladroites, si peu indiquées ?  Comment devais-je m'y prendre ?  Ces pleurs exprimaient-ils l'intensité de la seule douleur physique, une décharge émotionnelle, une dépression sous-jacente ?

Qu'était-ce donc que cette fibromyalgie ou fibromyosite ?  En 1988, les deux termes étaient encore indifféremment utilisés, la maladie étant souvent méconnue et le terme non sanctionné par les instances officielles.

Il fallut attendre 1990 pour que l'American College of Rheumatology (ACR), puis la conférence internationale de Copenhague et l'Organisation mondiale de la santé en 1992, reconnaissent le syndrome de la fibromyalgie.

Les études de laboratoire n'ayant pas démontré de changements de type inflammatoire dans les cellules des muscles douloureux, les expressions fibrosite et fibromyosite, dont le suffixe «ite» signifie inflammation firent place au mot fibromyalgie.

De la neurasthénie à la fibromyalgie

La maladie n'est pas nouvelle, pourtant.  Elle a, depuis le début du siècle, été explorée sous diverses dénominations, dont la variété constitue déjà une bonne indication sinon de la cause, du moins des symptômes répertoriés.  En l'absence de signes cliniques reconnus et objectivables, plusieurs médecins ont penché, jusqu'à tout récemment, vers une hypothèse essentiellement psychologique.
 
 

La fibromyalgie, syndrome appartenant à la famillle des rhumatismes, est une condition douloureuse généralisée, non articulaire, touchant surtout les muscles, typiquement associée à des raideurs, à une fatigue persistante et à un sommeil peu réparateur.  Elle peut être primaire, secondaire ou concomitante et fait le plus souvent partie d'un syndrome élargi comprenant des désordres neuro-végétatifs et des phénomènes attestant une activité sympathique accrue.  Déclaration de Copenhague

Les Britanniques transformèrent d'abord en encéphalomyélite myalgique la fameuse neurasthénie de l'époque victorienne, caractérisée par un mauvais sommeil, de l'épuisement, des maux de tête, des douleurs diffuses, des troubles gastro-intestinaux, l'irritabilité nerveuse et la dépression.

Gowers, en 1904, conclut quant à lui, à un «processus inflammatoire intéressant les parties mollees» qu'il nomma fibrosite...

Les Américains eurent, entre autres, le syndrome myasthénique ou neuromyasthénique, puis le syndrome rhumatismal non articulaire.  Au Canada, Smythe (1972) en fit un syndrome clinique de «douleurs  musculaires vagues, d'allure souvent psychogénique».  Il établit une cartographie des sites prévisibles de douleur à la palpation.

À la barre : accusés, complices ou témoins ?

Les causes de la fibromyalgie sont, à ce jour, inconnues.  L'hypothèse virale, que l'on retrouve dans le syndrome de fatique chronique (SFC), n'a pu être, ici, suffisamment étayée.

Se retourvent au banc des accusés :
la condition physique et aérobique déficiente-  Indépendamment du sexe et de l'âge, la fibromyalgie aurait une faible incidence chez les gens s'adonnant régulièrement à l'exercice physique.
la détresse psychologique (dépression, anxiété, psychosomatisation)
les troubles du sommeiil.

Ces facteurs coexistent chez la plupart des fibromyalgiques.  Ils entretiennent certainement la douleur, mais ils pourraient bien n'être que les éléments contributifs du cercle vicieux de la douleur chronique, plutôt que la cause initiale de la maladie.
 

Accusés, complices ou témoins -  Douleur  = sommeil non réparateur + fatigue 
Douleur  = dépression 
Douleur  =  inactivité physique 

Source :  Ccarette, S., op. cit.   

  Classification de la fibromyalgie    

Facteurs sociaux et environnementaux 
-  stress dans la famille et au travail 
-  litiges en suspens 
-  insécurité financière 
-  risque de perte d'emploi 
-  rôles irréalistes
Facteurs biomécaniques 
-  hyperlaxité 
-  surutilisation et surcharge mécaniques 
-  faible condition physique et aérobique 
-  tension corporelle généralisée

  FIBROMYALGIE PRIMAIRE    

Facteurs neuro-hormonaux 
-  intolérance au froid 
-  fatiguabilité élevée 
-  déséquilibre du S.N.A. 
-  sommeil non récupérateur
Facteurs psychologiques 
-  désordres affectifs 
-  troubles anxieux 
-  dépression 
-  comportements désespérés

 
 

FIBROMYALGIE
SECONDAIRE

-  désordres hormonaux 
-  maladies inflammatoires 
-  traumatismes

FIBBROMYALGIE CONCOMITANTE

-  arthrose 
-  arthrite rhumatoïde 
-  lupus éryththémateux 
-  maladies du tissu conjonctif 
-  autres maladies 

Source :  adapté de Masi, A.T., Journal of Musculoskeletal Pain, 1993.

La diffusion des points douloureux de la fibromyalgie pourrait aussi résulter d'une hyper-réaction en chaîne du système sympathique à une douleur locale primitive unique (syndrome de surcharge ou de surutilisation, contracture musculaire, trouble segmentaire de la colonne vertébrale, traumatisme, complication post-chirurgicale).

Le symdrome myofascial chronique, l'hypothyroïdie, l'arthrite rhumatoïde, la polymyalgie, le lupus érythémateux systémique et d'autres maladies rhumatismales, des maladies du tissu conjonctif peuvent coexister avec la fibromyalgie ou y prédisposer.

Source :  Brücle et al., op. cit. Un syndrome d'hypersensibilité ? L'hypothèse d'un déséquilibre dans la production de certains neuromédiateurs, la sérotonine et la substance P, semble rallier les suffrages, même si les chercheurs ne peuvent dire s'il s'agit ici de causes ou de conséquences du sommeil non récupérateur et de la fibromyalgie.

Le phénomène de la douleur se joue tout au long du parcours sensitif, modulé par deux neuromédiateurs :  la sérotonine et la substance P.  Dans la douleur chronique, la perception de cette douleur devient de plus en plus intense, à mesure qu'elle voyage du système périphérique vers le système nerveux central et le cortex.

Les niveaux sanguins de sérotonine et de l'un des ses précurseurs, le tryptophane, sont plus bas chez les fibromyalgiques, la substance P, plus élevée dans le liquide céphalorachidien.  La noradrénaline (serait ausi en déséquilibre.

La substance P permet aux fibres sensitives d'acheminer dans les deux sens le message de douleur (à partir du muscle, par exemple, jusqu'au cerveau).  Un niveau plus élevé de cette substance P, rendrait plus sensibles toutes les fibres nociceptives de la chaîne, qui seraient exacerbées par des stimuli en-deça des seuils normaux de douleur, même en tenant compte des variables individuelles en ce domaine.  Cela expliquerait que plusieurs de nos clients fibromyalgiques n'arrivent pas à tolérer certaines manoeuvres, même relativement douces.

La sérotonine, quant à elle, a une action infiniment complexe sur plusieurs sous-réseaux de neurones, avec des récepteurs spécifiques sur plusieurs cibles, qu'elle inhibe ou active ;  sa carence, si elle est liée à la fibromyalgie, pourrait expliquer que les symtomes en soient si variés et relèvent de tant de systèmes physiologiques différents.

-  La sérotonine a un rôle reconnu dans la perception et la modulation de la douleur.  Elle inhiberait généralement la transmission des messages douloureux.
-  Elle gère aussi l'alternance de la veille et du sommeil.
-  Elle stimule les cellules vagales de l'intestin, commandant plusieurs fonctions neuro-végétatives, souvent atteintes chez les fibromyalgiques :  péristaltisme et fonctionnement du tube digestif, rythmes cardiaque et respiratoire, température corporelle.  Ces fonctions sont aussi sous la dépendance du système sympathique, par l'entremise de la noradrénaline.
-  La sérotonine régit aussi la vaso-motricité et la vaso-constriction, leur perturbation se traduisant par une dilatation des vaisseaux sanguins.  Cette dilatation entraîne une fuite du plasma et des substances qu'il contient, dont la sérotonine, hors des vaisseaux.  À l'intérieur de la boîte crânienne, par exemple, en périphérie du cerveau, cette dilatation, de même que la sérotonine libérée hors des cellules (et qui joue ici un rôle d'activateur, puisqu'elle stimule les fibres nerveuses de la paroi des vaisseaux, qui transmettent alors un message de douleur) déclencheraient la migraine.

Voici, de plus en plus, une remarque personelle, dont je n'ai pu trouver de confirmation explicite dans les textes médicaux : j'ai souvent observé qu'un mauvais dosage des manoeuvres, en particulier l'utilisation répétée, ne serait-ce que légèrement trop, d'une même manoeuvre sur un site donné (particulièrement dans les régions dorsale moyenne et interscapulaire), provoquait l'engorgement immédiat des tissus.  Je n'ai que rarement retrouvé ce phénomène chez les personnes qui ne souffraient pas de fibromyalgie.  Y aurait-il un lien aven la vasodilatation et la fuite plasmatique ?

Peut-être nos collègues homéopathes verront-ils un lien utile dans le fait que la sérotonine se trouve, outre chez l'homme, dans le venin de crapaud, de scorpion et d'abeille.  Le lait contient aussi un précurseur de la sérotonine, le tryptophane, ce qui expliquerait en partie l'efficacité fréquente du lait chaud de grand-mère contre l'insomnie.  Ce tryptophane, issu de la dégradation de certanies protéines dans l'intestin grêle, se retrouve également dans les aliments riches en protéines ;  viandes et produits laitiers. La femme fertile et le jeune homme La fibromyalgie touche principalement les femmes en âge de procréer.  Elle apparaît plutôt chez la femme de 35 (25 chez certains auteurs) à 40 ans.  Le tableau clinique se généralise entre 45 et 55 ans (ce qui prend en moyenne 7 ans), et régresse au-delà de 60-65 ans.  Elle persiste rarement à l'âge avanncé.

Elle apparaît beaucoup moins fréquemment et beaucoup plus tôt chez les hommes (au début de la vingtaine) et évolue plus brusquement. Le tableau clinique complet s'installe en moins de deux ans.  Quelques rares cas précoces ont été signalés chez les enfants. Le tableau clinique Le tableau clinique essentiel de la fibromyalgie se compose de douleurs et de raideurs généralisées, persistant depuis au moins trois mois.  Les personnes rapportent aussi des engourdissements, un gonflement subjectif, particulièrement des doigts et des mains ainsi que des maux de tête, une fatigue persistante et un sommeil non récupérateur.
 
 

Symtomatologie neuro-végétative : 
refroidissement des extrémités 
dermatographisme 
arythmie respiratoire 
hyperhidrose 
tremblement etc...
Migraines 
boule pharyngée 
troubles respiratoires fonctionnels 
troubles gastrointestinaux 
dysménorhées

Symptômes fonctionnels et neuro-végétatifs de la fibromyalgie.
Source :  Brükle et al., op. cit.

Elles se plaignent d'irritabilité de la vessie et du tube digestif (surtout du côlon), de dysménorrhée, malaises qui sont souvent apparus avanat les premières douleurs musculaires.  Environ 45% de ces personnes vivent ou vivront aussi un état anxieux ou dépressif.

Peuvent aussi compléter le tableau, des signes d'une activité accrue du système sympathique :  pieds et mains froids, syndrome de Raynaud, bouche sèche.

Brükle souligne que la fibromyalgie n'est pas une entité nosologique, mais bien un syndrome traduisant les réactions exacerbées de l'organisme à un grand nombre d'agressions diverses.  C'est un point de vue sur la maladie que partage ne partie le shiatsu.  C'est bien afin de découvrir toutes les composantes - symptômes particuliers au client qui consulte et agents déclencheurs - que l'entrevue de bilan de santé devra être menée minutieusement.  Elle précisera le diagnostic énergétique et complétera la lecture du hara. Des douleurs envahissantes Par douleur généralisée, on entend un ensemble de douleurs touchant les deux côtés du corps, en haut et en bas de la taille, et des douleurs squelettiques axiales (colonne vertébrale, cage thoracique - poitrine et dos).

Dans la fibromyalgie, les régions cervicale, lombaire, thoracique, les ceintures scapulaire et pelvienne, les mains, les coudes, les genoux, peuvent être douloureux.  Ces douleurs sont décrites comme diffuses, profondes, brûlantes, exaspérantes ou décourageantes et souvent plus intenses que dans l'arthrite rhumatoïde.  Elles peuvent amener jusqu'à 60% d'incapacité :  plusieurs personnes se relèvent incapables de vaquer même à leurs tâches domestiques.

Ces douleurs sont exacerbées de façon significative par l'air climatisé, le froid, l'humidité, les changements de température, l'activité physique tant insuffisante qu'exagérée, le manque de repos, le stress.  Elles suivents des oscillations diurnes et saisonnières, avec des maxima le matin et le soir, au printemps et à l'automne.

Pour environ 82% des personnes atteintes, la fibromyalgie évolue lentement, à partir d'une douleur locale unique, généralement sise à la colonne cervicale ou lombaire, plus rarement aux régions maxillaire ou sternale, ou encore aux membres (2% seulement souffrent au départ, d'un syndrome douloureux diffus).  Le syndrome pourra aussi se développer à partir d'une zone myofasciale chronique ou de tendinite en chaîne.  Au début, les troubles caractéristiques du sommeil sont absents.

Dans 50% des cas, la fibromyalgie évolue par épisodes de rémissions et de récidives, les intervalles non douloureux raccourcissant de plus en plus : pour l'autre 50%, la progression sera ininterrompue. Se réveiller plus fatigué que la veille L'organisme connaît trois états neurophysiologiques essentiels :
-  la veille
-  le sommeil lent (sommeil NREM ou No-REM) - sans rêve, qui va, en quatre stades, de l'endormissement au sommeil profond
-  et le sommeil paradoxal (que les Américains nomment REM, de Rapid Eye Movements), le sommeil des rêves.

Le sommeil lent a pour fonction essentielle la restauration et le maintien de l'intégrité physique.  C'est un état de repos comportemental, dans lequel le sujet est calme, immobile :  le pouls et la respiration sont réguliers, la tension artérielle abaissée.  Il permet la synthétisation de l'A.R.N. et des protéines, les processus de cicatrisation, le recouvrement après l'effort.

De plus, le sommeil lent prépare l'apparition du sommeil paradoxal qui, entre autres par le rêve, a pour fonction l'adaptation à la vie somato-psychique, la restauration des mécanismes de gestion du stress (catécholaminergiques), et la mémorisation.

Les stades III et IV du sommeil lent, puis le sommeil paradoxal se répètent en des cycles de plus ou moins de 90 minutes.  Nos collègues shiatsuistes s'intéressent, à des fins de diagnostic, aux horaires des perturbations du sommeil !  (Par exemple, difficultés d'endormissement ;  méridien de l'estomac; la nuit : foie - vésicule biliaire ; au petit matin ; poumon, etc...).  Il leur sera peut être utile de savoir qu'à l'intérieur de ces 90 minutes, les périodes de sommeil lent, profond, sont plus longues au début et vers le milieu de la nuit, celles du sommeil paradoxal vers la fin de la nuit (après 4 heures du matin).  Or, il a été démontré que chez les fibromyalgiques, il y a intrusion des activités cérébrales de veille dans les stades III et IV du sommeil lent (sommeil profond), qui, pour paraphraser Shakespeare, «ne ravaude plus alors la maille trouée par le souci».

Les états de veille-sommeil sont sous la dépendance d'une trilogie hormonale : acétycholine (système parasympatique) et sérotonine.  Mais les scientifiques s'interrogent à savoir lequel, de la carence en sérotonine ou des perturbations du sommeil, normalement «maître nourricier à la fête de la vie», entraîne la fatigue, la douleur, l'anxiété, la dépression. Le diagnostic médical L'A.C.R. reconnaît la fibromyalvie en présence des critères suivants :  douleurs musculosquelettiques persistant depuis au moins 3 mois, un minimum de onze points douloureux à la palpation sur les dix-huit prévisibles (points de fibromyalgie) et au moins un trouble d'ordre neurovégétatif.

Sites douloureux (bilatéraux) à la palpation et/ou spontanés
1-  Occiput : à l'insertion des muscles sous-occipitaux
2-  Cervicales basses : vis-à-vis les espaces intertransverses C5-C7
3-  Chefs supérieurs des trapèzes : au point central, au-dessus de l'omoplate
4-  Sus-épineux : à leur origine, au-dessus de l'épine de l'omoplate, près du bord médian
5-  Côtes, à l'articulation costo-sternale de la 2ième côte
6-  Épicondyles : à un point distant de 2 cm des épicondyles
7-  Fessiers : dans le quadrant supéro-externe de la fesse, au rebord supérieur de la fesse
8-  Grand trochanter : derrière la proéminence du trochanter
9-  Genoux : au bord interne, près de l'insertion de la patte d'oie, au centre du coussinet adipeux

+  *  Sterno-cléido-mastoïdiens (Brault et Comtois)
+  *  Articulations temporo-mandibulaires : muscles temporal et masséter (Brükle et al.).

Source :  Adapté de Camerlain, M. in Le clinicien, op. cit.

L'école allemande ajoute à cette liste de l'ACR les points de l'articulation temporo-mandibulaire, muscles temporaux et masséters, et Brault et Comtois les sternocléïdo-mastoïdiens.  J'ai aussi très souvent vu ces points hypersensibles chez mes clientes fibromyalgiques)

En dehors de maladies cocomitantes.  Il n'y a pas d'atteinte inflammatoire.  Les radiographies ostéo-articulaires sont normales.  Au niveau tissulaire, bien que le muscle ne soit pas détruit, on observe des anomalies non spécifiques (puisqu'on les retrouve aussi chez les sujets sédentaires ) : ces anomalies de la micro-circulation et du métabolisme cellulaire du muscle (baisse d'oxygène et d'ATP dans les points douloureux) pourraient être impliquées dans la genèse de la douleur.  Henriksson et Awad ont aussi trouvé des infiltrats de lymphocytes et de mastocytes, des anomalies mitochondriales, la présence de corps cytoplasmiques dans les myofibrilles, une nécrose des fibres musculaires.

Cela se traduit concrètement par un pincé-roulé douloureux des trapèzes, un signal de saut dans les zones myofasciales et les muscles sensibles, des taches rouges ou décolorées (dermatographies) et des nodules sensibles aux régions supérieure et inférieure du dos, ainsi qu'à la ceinture scapulaire.  Ces signes perceptibles à l'examen ou durant le massage s'ajoutent aux points de fibromyalgie. La gérance de la fibromyalgie La gérance de la fibromyalgie passe d'abord par l'écoute empathique et l'éducation de la personne atteinte.  Le message transmis par l'aidant, médecin ou thérapeute, doit être clair :  à ce jour, la fibromyalgie ne se «guérit» pas.  Il est cependant possible d'en retarder l'évolution, d'en espacer les épisodes, de diminuer la douleur, enfin, de se faire une vie familiale, sociale et professionnelle plus confortable, voire même agréable.

L'approche est de préférence pluridisciplinaire et doit entraîner la personne à prendre en charge le contrôle de sa douleur, l'amélioration des diverses fonctions atteintes, sa réadaptation à une vie relationnelle satisfaisante.  L'accent doit être mis sur les forces et les capacités restantes, plutôt que sur les incapacités.  Il importe cependant de se fixer des objectifs réalistes, souligne le docteur Simon Carette.  «La majorité des patients continuent d'être symptomatiques, à des degrés variables, malgré les traitements utilisés.  Il est donc utile de fixer ces objectifs en termes de pourcentage d'amélioration, sur une période donnée». Les objectifs du traitement *  La relaxation et l'élimination des situations contraignantes, en psychothérapie, s'il y lieu
*  La sédation de la douleur, en physiothérapie, sous forme d'enveloppements chauds, d'exercices d'étirement ; en massothérapie, d'effleurages et de massage des fascia toujours efficaces, mais de façon souvent temporaire ; à la maison, par l'eau chaude - douche prolongée, bain tourbillon et le repos.

L'injection locale d'analgésique peut parfois être indiquée ou la prise orale d'un analgésique léger, comme l'acétaminophène (Tylenol).  Brükel et al. rapportent qu'un essai en double aveugle a montré qu'au delà d'un certain effet placebo, le naproxène et l'Ibuprofène s'étaient révélés inefficaces.  Les anti-inflammatoires n'auraient aucun avantage sur les analgésiques simples, en l'absence de maladie concomitante qui les justifiaient.

*  La correction du poids et de la posture
*  Le recouvrement d'un sommeil réparateur, si nécessaire à l'aide d'anxiolytiques à faible dose (10% de la dose habituellement prescrite pour les dépressions).  Ces médicaments seraient utiles dans 30 à 40% des cas.

On encourage ausi la personne à s'inscrire dans un programme d'activité physique modéré, adapté à sa situation et sous surveillance.  Il semblerait que l'activité aérobique progressive (bicyclette stationnaire), serait préférable aux seuls exercices d'assouplissement, en améliorant l'oxigénation de l'organisme.  Le but de l'exercice, léger ou modéré, sera de contourner les effets de l'inactivité physique (anaéroble, appauvrissement de la circulation sanguine dans les tissus, faible résistance musculaire aux mouvements répétés, aux mises en tension et à l'effort) et d'augmenter la sécrétion d'endorphine.

On voit donc qu'à l'intérieur des limites de sa formation et, autant que possible, d'une équipe multi-disciplinaire, le massothérapeute a sa place, tant dans l'accompagnement, l'éducation que le soulagement de la douleur et la réénergisation de la personne atteinte de fibromyalgie.

Source :  Le Messager, novembre 1996
  Fibromyalgie et massothérapie par Danielle Dugas Hélène souffre de fibromyalgie aussi à l'automne 1994, elle m'appelle pour prendre rendez-vous, elle veut recevoir un Shiatsu.  Son médecin lui a recommandé cette approche car elle travaille les points d'acupuncture (sans les aiguilles) et favorise le drainage.

C'était la première fois que j'entendais parler de la fibromyalgie aussi, dans le but de mieux comprendre cette maladie et d'aider Hélène, j'ai fait des recherches et j'ai découvert tout un monde où la douleur musculosquelettique est omniprésente et où la massothérapie a sa place.

Dans ce dossier, je vous transmettrai les connaissances acquises tant par la lecture que par la pratique. Bilan de santé Lorsqu'une personne a un diagnostic médical de fibromyalgie, c'est qu'elle est suivie depuis un certain temps par un médecin.  Elle a passé toute une batterie de tests qui se sont révélés pour la plupart négatifs.  Elle peut souffrir d'autres problèmes connus (rhumatisme, arthrite, ostéoporose, tendinite, bursite, etc...) associés à la fibromyalgie et dont vous devez tenir compte.

-    douleur généralisée (faire préciser les endroits les plus douloureux, les moins douloureux)
-    difficulté à dormir
-    sensation de fatigue continuelle
-    difficulté à se lever le matin
-    douleur qui augmente avec la température, l'exercice
-    mal de tête
-    douleur abdominale
-    sensation d'enflure

Vérifiez auprès de la personne les démarches qu'elle a déjà entreprises, les résultats obtenus et le degré de satisfaction.  Ceci peut vous mettre sur une piste à suivre et vous permettre de mieux connaître le niveau d'engagement de votre client.

Demandez-lui si elle est sous médication et pourquoi.  Ceci vous donnera une bonne idée du degré d'intolérance aux symptomes ressentis par la personne et également durant son suivi.  Vérifiez s'il y a changement dans la médication, afin de permettre de constater une amélioration ou une détérioration dans l'état de votre client.

Lors de la première rencontre : vérifiez les attentes de la personne.  Pourquoi vient-elle en massothérapie ?  Accepte-t-elle sa maladie.  Vous semble-t-elle agressive, déprimée, méfiante, confiante. Examen a)    Bilan musculaire et articulaire :

La fibromyalgie se caractérise par la douleur musculaire généralisée et par des «points sensibles».  Ces points sont très douloureux.  Dans un premier temps le massothérapeute doit localiser les points douloureux.

Travaillez de façon «exploratoire» pour établir une «carte» de la douleur (endroits très douloureux à non douloureux).

Soyez attentif aux signes de douleurs lors des mobilisations articulaires.  Il ne devrait cependant pas avoir d'enflure des jointures n'y de limite de mouvement des jointures.

b)    États tissulaires :

Vous pourriez trouver:

-    une vive sensibilité au «pincé-roulé» sur la région scapulaire supérieure et sur le trapèze moyen et supérieur
-    la présence de «nodules» sensibles (tissus gras ou gras et fibreux) à la partie supérieure du dos, dans l'enveloppe de l'épaule ou dans la partie basse du dos
-    la présence d'hyperémie réactive (rougeur de la peau après la pression).

c)    Bilan énergétique :

Si vous travaillez en Shiatsu, lors du diagnostic du hara, il peut y avoir de la douleur au ventre (vessie, colon). Visées du massage Vous êtes en présence d'une personne qui ressent beaucoup de «douleur», votre rôle principal est de travailler avec la personne pour soulager, diminuer, apprivoiser ses douleurs.

Selon le Grand dictionnaire médical pour la famille : «La douleur persistante provoquera un processus d'auto-aggravation car elle inquiète, fatigue et même épuise le malade.  Elle entraîne des phénomènes neuro-végétatifs et psychologiques qui amplifieront le signal douloureux et finiront par le rendre insupportable»

-    Relaxation

«Le stress augmente la douleur, diminue la tolérance à la douleur».

Découvrez avec la personne les endroits de son corps qui ne sont pas douloureux au toucher.  Puis, partant de ces endroits, amenez la personne vers un début de relàchement qui va permettre ensuite d'aller vers les endroits plus douloureux sans accentuer la douleur.

Faites réaliser à la personne que son corps n'est pas que douleur et que lorsqu'elle réussit à relâcher, à se laisser aller, la douleur diminue ;  elle devient moins envahissante.

-    Détente musculaire

«Une tension musculaire prolongée entraîne la douleur»

Amenez les muscles à se détendre.  Les personnes qui souffrent de fibromyalgie sont souvent tendues musculairement, alors le moindre mouvement devient douloureux.  Le massage aide à soulager.

-    Le lâcher-prise

Par le massage, la personne apprendra à faire confiance à l'autre, à ne pas toujours vouloir faire à la place des autres.  Elle découvrira le bien-être qu'apporte le lâcher-prise. Les manoeuvres indiquées Le premier massage aura pour but principal d'évaluer la douleur chez la personne.

Soyez très attentif au moindre signe de douleur.  Demandez à la personne de vous guider lors de cette exploration.  Un léger effleurage peut être douloureux.  Vous pourrez ensuite composer vos massages selon les données recueillies, chaque personne est différente.

-    Massage très doux - effleurage

Si vous utilisez le Shiatsu, faites des pressions légères lors des premières rencontres.  Progressivement, augmentez la pression tout en tenant compte de la douleur ressentie par la personne.

-    Mobilisations passives

Elles peuvent être difficiles à réaliser, car la personne a tendance à prendre la mobilisation en charge.  Les mobilisations passives, même très douces, peuvent provoquer de la douleur.

-    Étirements légers

Faites des étirements légers.  Allez-y toujours très lentement pour amener la personne à relâcher.

-    Pétrissages, drainages, frictions

Intégrez doucement ces manoeuvres.  Elles se feront presque à fleur de peau lors des premières séances.  Puis vous pourrez les augmenter graduellement selon l'évolution de la douleur.

-    Pression

Exercez une pression sur les points sensibles.  Cela peut produire une douleur momentanée suivi d'un relâchement.  Allez-y doucement et progressivement.  Gardez la pression quelques secondes.

-    Drainage lymphatique

Intégrez, si désiré, le drainage lymphatique.  C'est une approche douce qui travaille sur le système immunitaire.  On pense que ce système pourrait être différent chez les personnes qui souffrent de fibromyalgie.

-    Fréquence et durée du massage

Idéalement, le massage devrait s'intégrer dans une approche mutidisciplinaire personnalisée.  Le milieu médical s'entend pour dire que la personne qui souffre de fibromyalgie doit prendre sa maladie en main.  Donc, la fréquence et la durée du massage doivent être choisies en fonction des autres démarches entreprises par la personne pour retrouver son bien-être et de la place qu'elle donne au massage dans sa réadaptation.

Précautions

La fibromyalgie n'est pas une affection mortelle ou dégénérative, il n'y a aucun dommage musculaire ou tissulaire mais la personne est «hypersensible» au toucher.

Veillez à ne pas augmenter la douleur, à cette fin :
-    maintenez la pièce à une température adéquate
-    installez la personne de façon la plus confortable possible (coussins, etc...)
-    travaillez en douceur et soyez trjès respectueux face à cette douleur.

Veillez à ce que la personne ne devienne pas dépendante de vous.  Rappelez-lui qu'au bout du compte, c'est elle qui est responsable de l'amélioration de son état. Relation d'aide La fibromyalgie amène des sentiments de frustration, de colère.  Les personnes se sentent seules, perdues, incomprises, incompétentes.  Elle ne peuve plus tout faire comme avant.  Leur estime d'elle-même est mise à rude épreuve.  Qui va les aider ?  Elles sont amenées à faire de gros changements dans leur vie.  Elles ont souvent besoin d'être écoutées et de se sentir soutenues.  La relation d'aide est importante, il faut savoir écouter et diriger vers un spécialiste au besoin. Conclusion Je crois que le massothérapeute a sa place dans le traitement de la fibromyalgie, s'il est capable de composer avec la douleur de l'autre, d'accepter de l'accompagner dans un long cheminement où les résultats sont probants et de courte durée.  Il faut être capable de vivre l'incertitude tout en gardant l'espoir, pour pouvoir le transmettre.  Il faut aussi faire preuve de souplesse et d'adaptation. Posséder plusieurs techniques peut s'avérer un atout précieux.

Accompagner la personne dans la découverte de la relaxation, de la détente, du lâcher-prise.  Lui faire prendre conscience des réflexes de tension incrustés dans son corps pour qu'elle puisse reprendre le contrôle de son corps.  Voilà un beau contrat.

1.    Points sensibles - Points "Trigger" - Points douloureux

Le point sensible est localisé dans un muscle ou un tendon, habituellement, il est dans un endroit où le patient ne ressent pas la douleur et ne se plaint pas de cet endroit.  Autour de ce point on peut découvrir une bande élastique tendue reconnaissable au toucher et qui a la consistance d'une corde.

Le fait de  mettre une pression équivalente à environ 4kg (suffisante pour faire blanchir l'ongle du doight) avec la pulpe du pouce amène un signal de douleur et cette pression amène généralement de la douleur ailleurs dans les muscles plus ou moins près du point (douleur référée)

Source :  Le Messager, novembre 1996






Adapté par Louise Rochette Louise
Email: LouiseRochette@gmail.com